"Aujourd'hui, clairement, pour l'autorité politique, la question énergétique n'est pas un problème majeur. En outre les pouvoirs publics - reste de colbertisme ? - ont tendance à privilégier l'offre : ce qui importe, ce n'est pas le consommateur, mais le producteur ; la question de l'énergie n'est pas de savoir combien il en faut pour être heureux, mais comment nous allons arriver à en produire toujours plus (...) Vous n'avez pas aujourd'hui de formation à l'énergie chez les architectes. Quand ils construisent un bâtiment, le problème de savoir comment on le chauffera et comment on le climatisera est secondaire. On branche la prise et c'est tout. L'électricité vient du mur, c'est bien connu !"

"Nous sommes au stade où nous ne pouvons plus considérer que le monde est infini. C'était une approximation acceptable quand notre espèce comptait quatre millions de chasseurs-cueilleurs à la surface de la planète. C'était encore une approximation acceptable quand nous étions quarante millions d'agriculteurs au début du néolithique. À six milliards d'homo industrialis, cela cesse d'être vrai "

"Quand vous entendez aujourd'hui que nous avons quarante ans de pétrole, soixante ans de gaz, et deux siècles et demi de charbon, c'est en supposant que la consommation devienne tout d'un coup constante. Mais la consommation augmente sans cesse ! Avec la poursuite de la croissance actuelle, donc, tous les tiroirs inventoriés sont vides dans cinquante ans.

Si maintenant on prend ce qu'on appelle les réserves ultimes, c'est-à-dire la limite supérieure de tout ce qui pourra être extrait de terre du début à la fin de l'histoire pétrolière (ou gazière, ou charbonnière), nous obtenons à peu près cinq fois plus de réserves que ce qu'on connaît aujourd'hui (...) Mais, par la magie des exponentielles, à 2 % d'augmentation par an, nous avons tout vidé en un siècle. Qu'est-ce que cela veut dire ? Qu'au rythme actuel d'augmentation de la consommation d'énergie fossile, nos affaires s'arrêtent bien avant 2100"

"Dans le passé, un changement d'ère climatique, cela a été quelques degrés de différence de la température planétaire moyenne. Actuellement la température moyenne de la planète est de 15°C. Lors d'une ère glaciaire, elle est de 10°, et avec ces cinq degrés en moins, le visage de la terre est complètement différent. La France est une steppe avec un sol gelé en permanence qui interdit l'agriculture. Il y a un glacier de 3 km d'épaisseur sur l'Allemagne, et on peut passer à pied sec de France en Angleterre, parce que le niveau de la mer a baissé de cent vingt mètres. Les précipitations en Europe sont divisées par deux. Dans l'autre sens, c'est-à-dire cinq degrés en plus, on ne sait pas exactement, à dire vrai, ce que cela pourrait être, parce que cela serait une élévation sans précédent pour notre espèce. Nous savons néanmoins que cela sera un changement d'ère climatique, et qu'au lieu de s'étaler sur dix mille ans, comme une sortie d'ère glaciaire, ce réchauffement se ferait en un siècle."

"Il faut jouer sur trois axes. D'abord, la diminution de la quantité d'énergie consommée par personne. La seule bonne question à ce propos est de savoir si deux fois moins d'énergie, c'est deux fois moins de bonheur ou pas"